lundi 22 octobre 2012

LE SYMBOLISME - SUITE


Suite à plusieurs demandes, je reviens sur la dimension symbolique de mon roman, deuxième niveau de lecture qui permet la transmission d’information, de clins d’œil aux initiés, et une appropriation de l’histoire de manière plus immédiate. D'où le travail de Carl Gustav Jung sur les symboles dans sa recherche des archétypes en psychanalyse, rejoignant celui de Bettelheim sur les contes. Objets d’études pour la raison, ils sont aussi vecteurs de sens pour l’inconscient. D’où leur force et leur portée.
Voici donc quelques clés pour mieux appréhender mon livre. Je ne reviendrai pas sur l’explication des symboles alchimiques, bouddhistes, tantristes, que j’ai déjà développée dans mon ouvrage et qui, du fait qu’elle était explicite, a sauté aux yeux de tous les lecteurs. Je souhaite plutôt faire la lumière sur ce qui était caché dans la trame de mon ouvrage et qui a pu éluder votre sagacité.

Tout d’abord, il n’aura échappé à personne que mon roman comporte 33 chapitres et que c’est au cours de ce dernier que se déroule l’initiation au secret de la Pierre Philosophale. Ce n’est évidemment pas un hasard et je ne reviendrai pas sur les différents sens du chiffre 33 (vertèbres, devas au royaume de Tatgyamin, 33e degré maçonnique, mort de Jésus à 33 ans après avoir accompli 33 miracles, 33 ans de règne de David, ...), sur lesquels je me suis déjà étendu, mais qui renvoient tous au plus haut degré de connaissance et d’initiation, bref à l’Illumination.

Certains auront sans doute aussi remarqué que plusieurs de mes personnages portent des noms empruntés à Mozart et à son opéra maçonnique, « La flûte enchantée ». Dans cette œuvre musicale, le Prince Tamino (Eric), qui voyage en terre inconnue, est attaqué par un serpent (ouroboros) et s’évanouit. Revenant à lui, il se réveille et trouve le corps inanimé de l’animal. Arrive Papageno (Frank) qui se vante d’avoir tué le monstre. Papageno est un personnage pantagruélique, haut en couleur (son costume est celui d’un perroquet), bavard insatiable, aimant boire et manger, comme le Frank de mon roman. Je l’ai d’ailleurs associé au bœuf, avatar de Dyonisos (rôti de bœuf à l’ambassade, buffles dans les rizières au combat de boxe…). Trois dames (Aldo, Consule, Ambassadeur), les messagères de la Reine de la Nuit (Chopin), font taire Papageno : ce sont elles qui sont venues au secours du jeune prince. Elles remettent à ce dernier un portrait de Pamina (Sabai Pyu), fille de la nuit, comme l’indique les pierres de Lune que Sabai Pyu porte comme bijoux lors de sa première apparition. Pamina a été enlevée Sarastro (le Zawgyi), maître du royaume adverse, le royaume solaire de la sagesse des hommes.

Tamino tombe immédiatement amoureux et décide de délivrer Pamina car la Reine de la Nuit lui a promis que s’il la libérait il pourrait l’épouser. Dans sa quête, il est aidé par Papageno (Frank) et trois jeunes garçons (Ange Agostini, Mahtu Naw et Will Schlosser) qui les conduisent au palais de Sarastro (Zawgyi), où Pamina est tourmentée par un serviteur maure (Khin Zaw Htut) pour qu’elle l’épouse. J’ai aussi donné le nom de ce serviteur traitre à Paul Monostatos, dès lors qu’il sert Chopin, la Reine de la Nuit. Finalement, Tamino découvre en fait que Sarastro (le Zawgyi) n’est pas l’être maléfique dépeint par la Reine de la Nuit, mais qu’il règne sur le Temple de la Vérité. Il s’agit évidemment d’un résumé très grossier, qui passe notamment sur les épreuves sur lesquelles je reviendrai plus bas, mais qui montre le parallélisme que j’ai essayé de faire entre la trame de l’opéra et celle de mon roman.

« La flûte enchantée » n’est pas le seul renvoi à l’univers maçonnique. En effet, Naw Seng, le Kachin qui se fait assassiner, est aussi le parjure, le faux Frère qui rompt son serment. Il cherche la Pierre pour son profit personnel et en subit les conséquences. Il reproduit, avec Khin Zaw Htut, lui aussi alchimiste, et avec le moine-exorciste, le meurtre d’Hiram par trois compagnons, désireux de lui voler son secret. Tous les trois sont initiés et ont violé le secret à leur manière, tous les trois cherchent la Pierre pour eux-mêmes, et tous les trois finiront punis pour leur cupidité et leur trahison.

Par ailleurs, la description faite des temples des Aris s’inspire de la Loge maçonnique et de ses symboles. Sabai Pyu « retire le voile » des yeux d’Eric, lorsqu’elle allume sa lampe dans le temple de Bagan après qu’il soit entré par la petite porte (boyau), à laquelle il a frappé irrégulièrement… à coup de pierres polies maladroitement. Aurait-il eu un tablier qu’il se serait moins sali. Et ne bénéficiant pas du soutien d’un Frère pour guider ses pas, il trébuche constamment. De plus, ces temples souterrains rappellent le cabinet de réflexion dans lequel le futur Apprenti rédige son testament philosophique ; testament qui préfigure la mort symbolique du profane, sort qu’Eric a failli connaître au sens propre du terme. De même, la sortie se fait par une salle « humide », dans laquelle tous deux ont bu la tasse. Enfin, comme l’Apprenti au moment de son initiation, Sabai Pyu effectue à travers ses aventures trois voyages initiatiques (Bagan, Po Win Taung, Mont Bonkwan), la faisant passer par les quatre éléments alchimiques : la terre (Kyauk Gu Umin), l’eau (Irrawaddy), le feu (torture) et l’air (ascension du Mont Bonkwan). Initiation qui avait pris trois ans au moine Ari Mahtu Naw et qui ne prend que trois jours symboliques à Sabai Pyu.

A ce titre, le chiffre 3 n’occupe pas une telle importance dans mon roman par hasard. En plus de ces 3 voyages initiatiques, je parle de 3 montagnes dans mon livre. Les montagnes revêtent une signification sacrée dans toutes les cultures. Colonnes entre le Ciel et la Terre, entre les hommes et les dieux (Sinaï, Olympe, Meru, Fuji, etc.), elles sont l’axis mundi, le centre du monde. Il n’est donc pas surprenant que l’intrigue de mon livre tourne autour de 3 montagnes mythiques qui abritent en leur sommet le symbole de l’Illumination : Maung Aung sauve la Pierre en se réfugiant dans un monastère bouddhiste en haut de Mandalay Hill ; le Mont Meru abrite le royaume de Thagyamin, le saint patron des alchimistes ; et le Mont Bonkwan, associé à Tusita (Shangri La), est là où se trouve le Zawgyi. C’est aussi, en haut de cette montagne qu’Eric trouve ce qu’il était venu chercher au début de son aventure, ce que le temple de Delphes affichait sur son fronton : « Connais-toi toi-même et tu connaîtras l’Univers et les dieux ». 3 montagnes, 3 symboles, pour 1 Illumination.

De même, Sabai Pyu expérimente trois relations sexuelles au cours du récit : avec Eric (le cœur), avec Khin Zaw Htut (le corps) et enfin avec le Zawgyi (l’esprit). Et seule la dernière lui procure la paix, lorsque les deux premières lui apportent de la souffrance. Il s’agit ici du symbole de l’Illumination, de la paix intérieure, qui ne peut être atteinte que lorsque l’on sublime ses instincts, lorsque l’on se détache de son corps et de ses désirs. Ces trois relations sont aussi à chaque fois une union des opposées, comme le veut la tradition alchimique : femme et homme bien entendu, mais aussi tour à tour savoir et ignorance (avec Eric), bonté et cruauté (avec Khin Zaw Htut), vieillesse et jeunesse (avec le Zawgyi). Cette opposition de deux principes contraires, de l’ombre et de la lumière, se retrouve également dans le duo Sabai Pyu / Khin Zaw Htut, « pyu » signifiant « blanc » en birman quand Khin Zaw Htut se trouve complexé à cause de la couleur sombre de sa peau.

Ainsi, Sabai Pyu est celle par qui vient la Lumière. Elle est Hermès Trismégiste, le fondateur mythique de l’alchimie et auteur de la fameuse Table d’Emeraude. C’est la raison pour laquelle, lorsqu’elle apparaît pour la première fois, Sabai Pyu est habillé d’une soie verte renvoyant des reflets à la manière de l’émeraude, pierre associée à Hermès. Elle porte également un pendentif en pierre de Lune, dès lors qu’Hermès emportait les âmes sur la Lune pour les purifier avant de les conduire aux Champs Elysées. Elle initiera ses compagnons aux secrets de l’alchimie dans une boite de nuit au décor spatial (véridique mais pas anodin), sorte de temple à la voûte étoilée, boite noire contenant tout l’Univers, le Cosmos, en présence des autres Dieux de l’alchimie grecque, en particulier Saturne (Cronos) associé au plomb en alchimie, et Jupiter (Zeus), le roi des Dieux.

D’ailleurs, spécialiste de l’Art Royal (alchimie), Sabai Pyu n’est pas la descendante du roi Mindon pour rien. Incarnation d’Hermès TRIsmégiste, divinité à laquelle était associé le sens de la voix chez les Grecs, elle est aussi TRIlingue. De même, Hermès est le voyageur aux pieds ailés, le messager des Dieux. Sabai Pyu, elle, possède une agence de voyages, elle pédale vite, elle tourbillonne dans l’Irrawaddy, elle court à Pakokku, elle voyage par le rêve ou effectue les trois voyages de l’initiation. Enfin, Hermès est celui qui tient en main un caducée (sceptre avec deux ailes et des serpents entrelacés), qui guérit des morsures de serpent. Sabai Pyu, elle, ne craint pas le Naga, dont elle caresse le front.

Continuons sur la voie chymique si vous le voulez bien. Ce n’est pas non plus par hasard que la Pierre Philosophale se trouve dans un temple souterrain, référence au fameux V.I.T.R.I.O.L des alchimistes : « Visita interiorem terrae rectificando invenies operae lapidem » qui peut se traduire par « Visite (cherche) l'Interieur de la Terre (la matière première dont nous sommes faits) et, en te Rectifiant (en effectuant un travail sur soi-même) tu Inventeras (tu trouveras) l'Occulte Pierre (la Pierre Philosophale). » Ce crédo alchimique constitue la morale de mon livre. Enfin, les rêves dont d'autres passages forts en symboles de mon roman. S’y retrouvent le conflit entre l’ombre et la lumière, le travail au noir et au blanc, le miroir et le labyrinthe, omniprésents dans les initiations, les animaux totems, etc. Ils rappellent les d’initiations shamaniques et les voyages des corps astraux, etc.

Voilà, j’espère que ces quelques explications vous permettront d’apprécier encore davantage mon ouvrage et vous donneront envie de le relire à l’aune de ces explications.





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